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En quoi l’évaluation réaliste est-elle réaliste ?

QUESTION 1

 

 

Comme l’explique Pawson (2013), l’évaluation réaliste est qualifiée de ‘réaliste’ pour trois raisons :

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  • Ses objets sont les politiques et interventions qui prennent vie dans le monde réel (« real »).

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  • Son objectif est de répondre de manière réaliste aux préoccupations des utilisateurs de l’évaluation (« realistic »). 

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  • Elle est ancrée dans une philosophie réaliste des sciences (« realist »). Ce dernier point est crucial car il oriente la stratégie générale de recherche propre à l’évaluation réaliste.

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Le réalisme comprend des sous-divisions qui s’entrecroisent et dans lesquelles il est facile de se perdre (Madill, 2008). Parmi elles, on distingue le réalisme scientifique et le réalisme critique. Pawson et Tilley, dans leur ouvrage séminal de 1997, optent pour le qualificatif « scientifique » (« scientific realist analysis »), afin de légitimer la scientificité de l’évaluation réaliste et de se distancer du réalisme critique associé aux travaux de Bhaskar. Toutefois, leur positionnement ne coïncide pas avec le courant du réalisme scientifique, encourageant Pawson à prendre définitivement position pour la simple expression « évaluation réaliste » (« realist evaluation »). Notons que la terminologie « réalisme scientifique » est toujours de vigueur dans certains travaux concernant l’évaluation réaliste.

 

L’évaluation réaliste a souvent été associée au réalisme critique, malgré la distance prise par Pawson. Cette ambigüité trouve son origine dans l’existence de deux formes de réalisme critique, celui de Bhaskar et celui de Cook et Campbell. Le premier a une visée émancipatrice et cherche à développer une vision à partir de laquelle critiquer les autres interprétations du monde social. Le second met en avant la nécessité d’être critique par rapport à sa propre démarche de recherche, dans la perspective d’une recherche itérative de la connaissance fondée sur le principe de la falsification. Pawson soutient la seconde démarche, conduisant par exemple Maxwell (2012) à le classer dans la catégorie des réalistes critiques.

 

Néanmoins, ces auteurs s’accordent sur l’ontologie réaliste : la réalité existe de manière objective, mais ne peut toutefois être appréhendée que par les sens, ce qui rend sa connaissance imparfaite. C’est pourquoi le réalisme de l’évaluation réaliste est présenté comme un entre-deux, entre le positivisme et le relativisme (Wong et al., 2012). L’évaluation réaliste rejoint aussi le réalisme critique sur les plans épistémologiques et méthodologiques. Sur le plan épistémologique, il y a la reconnaissance d’une réalité objective. Cependant, cette réalité ne peut être appréhendée que par une production de connaissances socialement construites. Sur le plan méthodologique, l’approche réaliste privilégie la recherche en milieu naturel (naturalistic) et valorisent la triangulation des types et des sources de données.

​Pour aller plus loin : 

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  • Avenier, M.-J. & Gavard-Perret, M. L. (2012). Inscrire son projet de recherche dans un cadre épistémologique. In M. L. Gavard-Perret, D. Gotteland, C. Haon et A. Jolibert (Eds.), Méthodologie de la recherche en sciences de gestion - Réussir son mémoire ou sa thèse en science de gestion (pp.11-62). France: Pearson Education Universitaire. Disponible ici.

 

 

  • Maxwell, J. A. (2012). What is realism, and why should qualitative researchers care? In J. A. Maxwell (Ed.), A Realist Approach for Qualitative Research (pp.3-13). Thousand Oaks, CA: Sage Publications.

 

  • Pawson, R. (2013). Contested Complexity. In R. Pawson (Ed.), The science of evaluation: A realist manifesto (pp.48-80). London: Sage Publications. (particulièrement la section “The critical realist perspective”, pp.61-77)

 

  • Wong, G., Greenhalgh, T., Westhorp, G., & Pawson, R. (2012). Realist methods in medical education research: what are they and what can they contribute? Medical education, 46(1), 89-96. Disponible ici.

Question 2

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